Nature : Thèse
Spécialité : Sociologie/Sociologie du travail
Directeur : Fabienne Berton, Léa Lima
Annexes : bibliographie

Résumé : Depuis les années 1980, le chômage est au cœur des transitions sur le marché du travail en France. Les reconversions professionnelles qui s'y produisent sont l'objet de cette thèse. Notre travail de recherche s'appuie sur un corpus de récits de vie d'anciens chômeurs qui ont changé de métier à la reprise d'un emploi. Des données issues des fichiers administratifs de Pôle emploi permettent de compléter et d'objectiver ces données biographiques. Il repose également sur une analyse secondaire des données de l'enquête Emploi de 2005 à 2016. À partir des données de l'enquête Emploi, nous mettons au jour le caractère fréquent et régulier du phénomène. Toutefois, le passage par le chômage semble avoir davantage une incidence sur l'orientation professionnelle des reconversions que sur leur survenue. L'analyse des entretiens biographiques éclaire une relation causale non univoque entre chômage et reconversion. Le passage par le chômage peut être à la fois générateur et support de ces mobilités. Dans les deux cas le chômage et la reconversion peuvent être le fruit ou un facteur d'incertitudes dans les transitions. Quatre formes temporelles peuvent rendre compte des incertitudes qui pèsent sur les reconversions au cours du chômage : la figure du projet, celle de l'échec, le chômage comme opportunité de réfléchir à son avenir professionnel et enfin l'urgence/l'opportunité de trouver un emploi. Elles permettent de saisir des prévisibilités et des imprévisibilités entre des moments variés du passage par le chômage et le processus de reconversion. Une typologie inductive synthétise les logiques d'insertion/intégration des chômeurs dans un nouveau métier. Elle apporte une contribution originale à l'approche de la segmentation du marché du travail. Elle se compose de trois grandes configurations de reconversion segmentées. Des configurations correspondent à l'accès au cours du chômage à une nouvelle qualification reconnue et exigée le plus souvent à l'entrée de métiers qualifiés ou de professions réglementées. Des chômeurs provenant pour la plupart de métiers jugés peu qualifiés et en tension ont en revanche des difficultés à accéder à une telle qualification. De façon typique les femmes se reconvertissent dans des métiers féminins « dans les bureaux » et les hommes dans des métiers masculins dans la logistique. Des configurations de reconversion de chômeurs renvoient quant à elles à des métiers exercés le plus souvent seul : essentiellement féminins dans les services à la personne et masculins dans un entrepreneuriat de proximité. L'analyse détaillée de ces configurations de reconversion éclaire, dans une démarche comparative, les logiques sociales à l'œuvre dans l'orientation professionnelle de ces reconversions. Elle souligne ainsi la reproduction au cours du chômage d'inégalités sociales et de genre. [résumé auteure]